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Par André Parizeau,
Porte parole du PCQ
Une fois de plus, le débat sur les accommodements raisonnables refait surface, mais par le mauvais bout. Cette fois, c'est à cause du nouveau projet de loi No 16, déposé par le gouvernement Charest, qui est supposé clarifier ce qui est raisonnable et ce qui ne le serait pas en matière d'accommodements, sauf que le résultat final est tout le contraire. Ce nouveau projet de loi suit la controverse découlant d'une décision prise par la SAAQ de permettre à des citoyens d'exiger qu'ils ou elles passent leur examens de conduite automobile avec quelqu'un du même sexe, tout cela à cause de leur religion.
Tout comme c'était déjà le cas, l'an dernier, au moment du dépôt du projet de loi 63, portant sur une première modification à la Charte des droits et des libertés, le débat est en train de dévier vers une question qui n'en est pas vraiment une, à savoir si oui ou non on devrait hierachiser les différents éléments de cette charte. Comme si on voudrait réduire d'une manière ou d'une autre le droit de chacun et de chacune de pratiquer la religion de son choix, ou d'en pratiquer -- cela devrait aussi être un choix qui est , du reste, celui d'un nombre croissant de gens -- aucune. À la longue, cela devient quasi tendancieux.
Personne, nulle part, ne parle en effet de réduire ce droit d'exercer une religion, d'une quelconque manière. Ou de fermer des lieux de culte. Ou je ne sais quoi d'autre du même genre.
Le coeur du débat est plutôt ailleurs. À savoir si oui ou non, le Québec se veut être une société laïque, où ce droit de pratiquer la religion de son choix (ou d'en pratiquer aucune) reviendrait à un choix personnel, au tour duquel l'État devrait, quoiqu'il arrive, ne pas s'immiscer. Dit autrement, est-ce que oui ou non, il devrait exister une nette séparation entre les affaires d'État, ainsi que la manière dont le gouvernement interagit avec les citoyens et les citoyennes, et les questions de religion.
Sur papier, et de manière officielle, toute la gente politique, au Québec, dit souscrire au principe de laïcité de l'État. Même Jean Charest. Le problème, c'est que dans la pratique, le gouvernement de Jean Charest, se refuse à appliquer dans les faits les grands principes auxquels il dit souscrire. Le PQ ne fait pas mieux, comme on fait foi le fait que tous les partis représentés à l'Assemblée nationale refusèrent, l'an dernier, -- à ce moment là, Amir Khadir n'avait pas encore été élu --, d'enlever du Salon bleu de l'Assemblée nationale le fameux crucifix, tel que le suggéraient le Commission Bouchard-Taylor dans ses recommandations. Même le PQ fut du nombre.
Les libéraux continuent toujours à fermer les yeux et/ou à permettre des accommodements clairement déraisonnables, comme le démontre la récente affaire autour de la SAAQ. Quand le PQ était au pouvoir, c'était aussi le même genre de laxisme, chaque fois que des communautés religieuses, notamment en ce qui a trait aux règles devant régir les écoles, demandaient des exemptions ... et les obtenaient.
Et à chaque fois que de tels accommodements déraisonnables refont surface, cela relance du même coup la polémique. Et à chaque fois, il s'en trouve parmi ceux, au sein de notre chère élite des biens pensants, pour dire : mais attention, il ne faudrait pas songer à hiérarchiser ce que peut dire la charte des droits et libertés. Comme si cela était cela le débat...
Et à force de se faire répéter le même discours, cela finit même par teinter la manière dont bon nombre de gens, y compris ceux et de celles qui oeuvrent à gauche de l'échiquier politique, comme au sein de Québec solidaire, finissent aussi par aborder la question. Cela tend en même temps à nous mettre tous et toutes sur la défensive. Alors qu'on ne devrait pas ... Cela me fait un peu penser à la manière dont fut traité la polémique autour de l'utilité ou non d'inviter des groupes anglophones lors de la dernière Fête nationale, en juin dernier.
Dans le fonds, face à toutes ces tensions sociales auxquelles on peut parfois faire face, on devrait peut-être moins parler du fait que la population serait de plus en intransigeante face à l'intégration des nouveaux arrivants, et peut-être un peu plus parler de l'attitude inacceptable de nos gouvernements. Ce sont eux qui, à mon sens, sont les premiers responsables de la situation courante, ainsi que des dérapages qui peuvent parfois survenir.
Le problème de base, celui qui devrait vraiment nous préoccuper, c'est l'absence de volonté réelle, de la part d'une bonne partie de la gente politique (au delà des beaux discours...) pour finaliser la réforme de l'État visant à faire de celui-ci un appareil véritablement laic et moderne, comme le sont déjà bon nombre d'autres États dans le monde. C'est comme si, quarante ans plus tard, on ne voulait toujours pas compléter l'oeuvre de la révolution tranquille, amorcée par nos parents et nos grands parents ...
Ce qui pourrait concrètement aider à régler le problème, c'est de pousser, comme le font déjà bon nombre d'organismes et de groupes syndicaux et populaires, pour que le Québec se dote une fois pour toute d'une charte de la laïcité.
Autre point. Pour nous, au PCQ, l'important n'est pas tant de légiférer sur la manière dont les gens devraient s'habiller, ce qui relève et devraient continuer à relever de choix personnels (à moins de vouloir aller vers une sorte de société "Big Brother"), mais plutôt de s'assurer (comme nous le disions plus haut) que l'État, dans ses relations avec les citoyens et les citoyennes, garde les questions de religion à l'égard de ses propres choix, et s'en tiennent à des règles strictes de non intervention, en même temps que de respect pour ce que tous et chacun, peuvent penser et croire en privé, face à la religion. Cela exclut bien sûr le dossier et toute la controverse autour du port du niquab; on notera à ce titre que même le Congrès canadien musulman revendique maintenant que le port du niquab soit interdit.
En surplus de cette histoire à la SAAQ, une autre histoire a récemment fait couler pas mal d'encre. Il s'agit ici de ce professeur, oeuvrant dans une école, qui aurait fait la promotion devant ses élèves du voile (à ne pas confondre avec le niquab), ainsi que de certaines règles qu'elle même avait accepté au nom de la religion musulmane. Le problème de fonds dans cet autre cas n'était pas tant le fait qu'elle portait le voile (elle aurait aussi pu porté une croix en passant), mais bien le fait qu'elle outrepassait son devoir de réserve, en tant que professeur, par rapport à de telles questions. À supposé qu'elle n'ait pas alors porté le voile, mais qu'elle aurait quand même eu le même discours, cela n'aurait pas été mieux...
Finalement, et par rapport à toute la question de l'intégration des nouveaux arrivants, il est certain qu'il s'agit d'un autre très important débat à faire, et autour duquel il reste aussi beaucoup à faire. C'est en même temps un sujet distinct, à mener aussi , c'est sûr, mais néanmoins séparé du débat en cours.
Sujets reliés :
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que la direction du PCQ déclarait dès la sortie du rapport
Bouchard-Taylor à ce sujet; c'était en 2008
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