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Par André Parizeau (*)
 

La dernière grève tenue dans les transports en commun, à Montréal, fut l'occasion pour bon nombre de commentateurs de la scène politique et bien des éditorialistes d'exploiter au maximum la situation pour essayer de casser du sucre sur le dos des syndicats.  Ils en profitèrent alors  pour pousser en même temps l'idée de la privatisation de ce secteur.  Le discours était souvent complètement démesuré et la démagogie était poussée à l'extrême.

La même chose se produit généralement quand le syndicat des cols bleus de Montréal prend des moyens de pression, où quand de manière générale d'autres syndicats interviennent sur la scène publique et deviennent un peu trop "dérangeants".  Au moins aux yeux de certains.

À les entendre les syndicats sont trop puissants et nous mettraient tous et toutes en péril.
 

Un discours qui cloche dès le départ

Premier constat : le "nous" utilisé prêtent à confusion car plus de 40% de tous les travailleurs et les travailleuses, au Québec, sont syndiqués.  Seraient-ils donc leur propre ennemi ?  Autre point : les syndicats, de par leur nombre, représentent les organisations les plus larges et donc les plus représentatives qui soient dans notre société.  Aucune autre organisation ne peut prétendre avoir autant de membres.  Au départ, l'argument utilisé par ces commentateurs et ces éditorialistes a donc un problème de fond.

Mais là ne s'arrête pas les problèmes avec ce genre de discours anti-syndical.  C'est comme si on oubliait en effet qui, dans la société, contrôle l'économie.  Est-ce les syndicats ?  Sont-ils vraiment ceux qui délocalisent nos emplois ?  Sont-ils ceux qui n'hésitent même pas une minute avant de mettre en péril la survie même de régions entières quand ils décident de plier bagage et de s'en aller vers des cieux plus cléments (entendre par là plus profitables encore) ?
 

Un parti pris très net

Et que disent donc nos plumitifs quand de tels événements se produisent ?  Lancent-ils un appel pour que ces entreprises soient alors nationalisées ou que ces grandes multinationales soient remises au pas ?  Avez-vous déjà entendu parler ces gens pour réclamer une loi spéciale pour empêcher ces grosses compagnies de foutre en l'air l'avenir au complet d'une région ?  Bien sûr que non !  Car ces gens n'en ont que pour le secteur privé et quand le secteur privé fait des siennes, on préfère passer à autre chose.  Question de détourner l'attention ailleurs et, pourquoi pas, vers les "vilains" syndicats.

Bien sûr, une grève dans les transports en commun ne peut faire autrement que de créer bien des inconvénients.  De là à publier un "guide de survie" à l'intention des utilisateurs, comme l'a fait le journal La Presse, il y a cependant une marge.  Il fallait faire peur le plus possible, ainsi qu'à un maximum de gens, quitte à user de démagogie également au maximum.

Le secteur des mass médias vit sous la coupe d'une concentration extrême.  Deux grands empires -- Quebecor et Power Corporation -- en contrôlent une bonne partie.  Une telle situation est très dommageable; les effets sont documentés mais ils ne viendraient pas à l'esprit de nos éditorialistes d'exiger le démantèlement d'un tel contrôle.  De toute manière, la plupart de ces gens sont eux-mêmes sur la feuille de paie de ces gros empires.

Quand le gouvernement fédéral "vole" littéralement des milliards de dollars dans la Caisse de l'Assurance-emploi, que les gouvernements se succèdent à Ottawa sans que cette pratique ne cesse, et que ce sont finalement des syndicats qui décident de monter aux barricades pour s'objecter à une telle pratique, on pourrait au moins dire Bravo! ...  Même pas.  Quelle mauvaise foi !

Pourtant, c'est exactement ce qui vient de se produire avec l'annonce comme quoi la Cour suprême entendra finalement l'appel logé par la CSN pour mettre fin à une telle pratique.  Déboutée par la Cour d'appel, voilà maintenant la CSN qui n'hésite pas à se rendre jusqu'à la Cour suprême.  Cela fait des années que dure la bataille juridique menée par la CSN au nom des chômeurs et, en fait, au nom de tous ceux et toutes celles qui cotisent à l'Assurance Emploi sans même savoir s'ils pourront un jour pouvoir bénéficier de cette caisse.  C'est tout à l'honneur de la CSN, les méchants "vilains", ceux-là mêmes qui ne pensent qu'à faire des grèves et n'en ont que pour les intérêts purement corporatifs de leurs membres.
 

À propos du rôle joué par les syndicats

Il est de bon ton de prétendre que les syndicats sont uniquement concernés par leurs seuls membres et se foutent des autres ainsi que de tout ce qui ne touche pas directement à leurs conventions collectives.  Pourtant, les syndicats québécois ont été dès le début impliqués dans le mouvement contre la guerre en Afghanistan et en Irak alors que cela n'affectait justement pas de manière directe leurs conventions collectives.  Ils ont été au coeur des grandes mobilisations des années 60 qui amenèrent une bonne partie des grands acquis sociaux d'aujourd'hui et ils continuent également à appeler leurs membres à se mobiliser dans les nouvelles grandes batailles sociales de l'heure, tels que pour défendre notre environnement.  Le 22 avril dernier, ils étaient là pour défendre Kyoto.

N'auraient été des syndicats, une bonne partie de nos programmes sociaux seraient peut-être déjà privatisées aujourd'hui.  Évidemment, il y en a qui aimeraient bien que cela puissent se faire un jour.  Imaginez seulement tout l'argent qu'il y aurait à faire alors ... sur le dos de nous tous et toutes !

Les syndicats québécois ont une force que bien d'autres n'ont pas.  C'est vrai. Parfois, ils utilisent cette force de manière judicieuse; parfois, cela l'est beaucoup moins.  D'autres fois, ils n'utilisent tout simplement pas cette force alors qu'ils pourraient justement le faire et que cela serait drôlement utile pour l'avenir des choses.  Les syndicats ne sont pas parfaits mais ils peuvent et doivent faire partie de la solution pour faire avancer la cause du progrès social.  C'est une évidence et c'est finalement pourquoi les syndicats ne nous font pas peur.  Ils sont un plus.

 

(*)  André Parizeau était jusqu'à récemment le chef du PCQ.  Lors du XVIe congrès du PCQ, qui se tenait du 17 au 19 octobre 2008, un nouveau chef du parti fut élu en remplacement de ce dernier; André Parizeau avait déjà annoncé plusieurs mois avant qu'il ne demanderait pas un renouvellement de son mandat lors de ce congrès, préférant laisser la place à la relève.  Celui-ci demeure cependant porte-parole principal du Parti.  Le nouveau chef est maintenant Francis Gagnon Bergmann.

 

 



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