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Elgrably se confond en excuses ...

Vous êtes-vous déjà demandé ce que font aujourd'hui les "Lucides", tels les Lucien Bouchard, Joseph Facal et Alain Dubuc ?

Joseph Facal conseille maintenant Pauline Marois; Alain Dubuc travaille encore pour Power Corp, tandis que Lucien Bouchard est toujours prêt à offrir ses services aux "bons" patrons qui auraient quand même des problèmes avec leurs employés. Mais ont-ils encore des projets en commun ?  Il n'y a pas si longtemps encore, ils lançaient un appel solennel à tous les Québécois et les Québécoises pour qu'ils se serrent encore  plus la ceinture,  de manière à devenir plus tard moins pauvres ?...   Mais auraient-ils des ambitions  encore plus grandes pour l'avenir ?

Notre camarade Étienne Hallé s'est penché sur la question et nous offre aujourd'hui ce que pourrait être la prochaine étape de leur plan : s'en aller dans l'espace, aller là où aucun autre humain n'est encore allé -- pour reprendre une expression consacrée --, s'accaparer sur une échelle jamais vu encore plus de richesses pour tout simplement pouvoir ensuite toutes les dilapider, et tout cela, dans le plus grand respect de l'évangile néolibéral.

Voici donc le 8e épisode de cette vaste odyssée.

***

Par Étienne Hallé

Lucien Bouchard, le grand patriarche de la mission, active finalement la manette de libération des propulseurs auxiliaires.  Le vaisseau spatial amorce alors sa phase dite « de rectitude », c'est-à-dire qu’il suit la ligne prévue par les commanditaires de l’expédition.  Le lieutenant Dubuc regarde le La Presse partir à la dérive vers le néant.  Ce qui le trouble n’est pas l’endroit où le propulseur se dirige – savoir que le La Presse erre dans les confins de l’espace lui apparaît plutôt normal - mais plutôt de le voir libre de toute emprise.  La commissaire Elgrably reconduit Facal à l’infirmerie afin qu’il récupère de son coup sur la tête.  « Voyons voir ce qu’il y a dans la trousse de premiers soins Advil-Johnson & Johnson-Preparation H...  Ah, des Advil, et quoi d’autre?  Des bandages, des pansements, du désinfectant, du Preparation H pour le commandant, et ... c’est tout?!!  Nous partons cinq ou dix ans, peut-être même plus, et nous n’avons que vingt cinq Advil, quelques gazes et pansements, et un tube de Preparation H...  Il faut que j’en glisse un mot au Commandant ».  Elle couche alors Facal sur la civière de l’infirmerie et se dirige vers le poste de pilotage. 

Le Patriarche Bouchard, le torse bombé avec le bras droit placé derrière le dos, observe solennellement l’espace qui se dessine devant lui.  « Comme il a fière allure dans ses collants et sa combinaison moulante » pense-t-elle.  « Ce serais la posture idéale pour le faire en statue ».

-   Commandant ?

-   Patriarche!

-   Pardonnez-moi, Patriarche... c’est qu’il y a un petit problème.

-   Tout petit problème nécessite de petites personnes pour les régler.  Et comme nous sommes là, il n’y a pas de petites personnes pour le régler et donc logiquement pas de petit problème à régler, dit il sans modifier sa pose.

-    Bien, Patriarche...

La commissaire Elgrably se sent soudainement confuse : elle éprouve quelques difficultés à saisir le raisonnement du chef.  « C’est un grand avocat et un politicien expérimenté; il doit avoir raison » se dit elle.  « Mais est-ce réellement un petit problème ?  Non. »  Elle revient à la charge :

-    Commandant ?

-    Patriarche !  Encore un commandant et vous serez corvée de McDo avec Dumont!

-    Mille excuses.  C’est concernant le petit problème...

-    Quoi encore ?!

-    C’est que bien que le problème puisse sembler petit pour le moment, il pourrait avoir de lourdes conséquences dans un avenir plus ou moins rapproché.

-    Un petit problème avec du potentiel, en quelque sorte ?

-    Exactement, comman... patriarche!

-    Bon, comme nous avons toujours encouragé l’effort et le mérite chez ceux qui ont un certain potentiel, je crois que nous devrions prendre en compte ce petit problème potentiellement méritant et tout autant potentiellement grand.  Allez-y  commissaire, je vous écoute!

-    Voilà : nous n’avons que très peu de médicaments pour l’expédition et cela pourrait s’avérer problématique dans un avenir plus ou moins éloigné.

-    Ne me dites pas que les scélérats ont oubliés le tube de Préparation H ??? 

-    Non, Patriarche. 

-    Ah bon, c’est qu’à mon âge, il n’y a pas de chance à prendre : un fondement sain le matin peut s’avérer problématique le lendemain.

« Le commandant est vraiment un as des proverbes », pense la commissaire, admirative.

-   Ne trouvez-vous pas qu’il y ait trop peu de médicaments dans la trousse de premiers soins Advil-Johnson & Johnson-Preparation H?

-    Ma chère, nous demandons aux Québécoises et Québécois de s’en remettre au privé en ce qui a trait aux soins de santé.  Nous avons donc demandé aux entreprises privées de nous commanditer nos fournitures médicales.  Vous connaissez le principe de l’équilibre du marché ?  L’État ne doit pas interférer avec le privé, c’est donc logiquement ce dont nous avons besoin.

Satisfaite de la logique de la réponse du sage patriarche, Elgrably s’en retourne auprès du pauvre Facal, étendu sur sa civière.

 

(à suivre)

 

 


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